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Channel: Strass de la philosophie
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L'Europe des parasites

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Nous n'avons sans doute à aucun moment de notre histoire connu un développement en richesses aussi exorbitant. Cela se chiffre en un nombre astronomique de devises dont nous ne produirons aucun tableau tant la chose est palpable, d'une évidence devenue si naturelle qu'elle se confond avec le paysage. La crise est là pourtant, mais comme une illusion dont il conviendrait tout de même de dénoncer la ténacité, passée inaperçue en son irréalité. Cela ressemble à une tique dont l'injection narcotique ne laisse plus ressentir sa présence parasitaire. 
Les déficits que  nous connaissons en Europe sont en vérité des déficits fort rentables. Ils supposent un bénéfice dans les milieux financiers qui organisent la dette et tirent profit de la destruction des emplois. De l'argent qui nourrissait le bien public, ces institutions de granit et de marbre cherchent à capter la ressource en augmentant les taux d'intérêts chaque minute, directement prélevés sur nos impôts. Alors que l'impôt était conçu pour la mise en commun de créations citoyennes, alors qu'il était affecté à l'égalité humaine et au développement de valeurs culturelles, l'argent qui nous est extorqué au nom de l'Europe se voit affecté à éponger une dette dont l'existence est purement artificielle et factice. Comment pourrait être en dette un monde aux profits devenus indécents, chiffrés en billions de milliards?
L'Europe vit désormais de la pauvreté et du chômage selon une loi inverse de celle qu'avait énoncée Adam Smith. La richesse ne crée plus de richesses mais vit de la pauvreté. Elle n'est qu'une plus-value réalisée sur des prêts exorbitants alloués aux Etats incapables d'en négocier les taux. La prédation exercée par la sphère économique sur le domaine public relève de montages financiers sur lesquels les Etats membres ont perdu tout pouvoir. Il n'est pas vrai que l'Europe, dans sa conception actuelle, nous aurait permis d'amortir la crise, une crise qui n'est qu'imaginaire, distillée par d'habiles effets de mise en scène. De quelle crise parle-t-on, celle qui est organisée de toute pièce par des sociétés fantasques? Il n'y a pas d'autre crise que celle dont la projection relève d'une "illusion transcendantale" au fondement de l'Europe, sachant que les profits n'ont jamais connu un tel essor! 
Au lieu de nous protéger d'un libéralisme sans règles, sans codes, sans contrepartie morale, se prévalant d'une liberté intolérante à toute égalité, l'Europe est devenue le berceau d'une pensée apolitique pour laquelle l'Etat constitue le pouvoir à abattre. S'impose une prétention abjecte d'entreprendre, d'aspirer, de détourner, de défiscaliser, sans aucune intervention autre que celle de la technocratie qui dispense de rendre à la société les biens mal acquis, ne payant plus d'impôts tout en captant les bénéfices de la dette. L'hydre du capitalisme vit aux crochets des Etats qu'elle vampirise quand l'Europe lui ouvre des sièges confortables et une légalité dont la légitimité est hautement contestable. Un spectre survole l'Europe dont il y a des noms, illocalisables par délocalisations, intouchables par des accords dont nous ne voulons plus. L'Europe n'existe que par l'imagination savante de quelques prestidigitateurs qu'il convient de rendre visibles devant les peuples qui en sont victimes et devant lesquels ils auront historiquement à répondre des vandalismes commis.

Karl Aberstoen 

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